The Brown Sisters, New Canaan, Connecticut, 1975 | © Nicholas Nixon, courtesy Fraenkel Gallery, San Francisco

À quel âge est-on âgé?

Plus de temps ensemble

L’assistance aux person­nes âgées est tradi­ti­onnel­le­ment un secteur dans lequel de nombreu­ses fonda­ti­ons se mobi­li­sent. Avec le chan­ge­ment démo­gra­phi­que actuel, elles s’impliquent encore davan­tage. Car nous deve­nons de plus en plus âgés. Et les person­nes âgées sont de plus en plus nombreu­ses. Cette nouvelle situa­tion met à rude épreuve l’ensemble de la société.

«Le cœur ne devi­ent pas dément», déclare Beat Hänni, prési­dent du conseil de la fondation.

Depuis une bonne quin­zaine d’années, la fonda­tion Humor & Gesund­heit (humour et santé) souti­ent des initia­ti­ves et des projets qui amélio­rent la qualité de vie de person­nes âgées, handi­ca­pées et attein­tes de démence grâce à un humour respec­tueux et empreint d’une grande sensi­bi­lité. L’objectif de la fonda­tion est d’utiliser l’effet «théra­peu­tique» salu­taire de l’humour au profit de la santé physi­que et mentale de l’être humain. Faire entrer l’humour dans un établis­se­ment médico-social est une chose déli­cate et consti­tue un défi de taille. On marche toujours sur la corde raide. Les person­nes menta­le­ment agiles doivent se sentir concer­nées tout comme celles dont les facul­tés intellec­tu­el­les ont décliné. En effet, on ne doit pas sous-esti­mer l’effet de l’humour sur les person­nes démen­tes. Sourire, rire, avoir de la joie: tout cela aide. «Les clowns d’accompagnement spécia­le­ment formés savent et sentent de quelle manière ils peuvent encore stimu­ler les sens des person­nes démen­tes. Ils parlent, touch­ent, font de la musi­que et jouent avec les mimi­ques», expli­que Beat Hänni. «L’ouïe et la prise en compte visu­elle provo­quent des sensa­ti­ons et, souvent, les souve­nirs de longue date sont encore très prés­ents.» Cet humour subtil permet d’entrer en cont­act avec nos sembla­bles, de créer chez eux des émoti­ons et de les rendre heureux quand d’autres moyens sont deve­nus compli­qués à utiliser.

Un groupe en développement

La ques­tion du «bien vieil­lir» revêt de multi­ples facet­tes. Y répondre va deman­der de plus en plus d’efforts à notre société. Cela va mettre à rude épreuve l’État, la science, l’économie, les OSBL et les fondations. 

Il ne faut pas voir les uns et les autres comme des concurr­ents mais comme des orga­nis­mes qui se complè­tent mutu­el­le­ment par leur enga­ge­ment. «Je vois surtout une coopé­ra­tion», affirme Maja Nagel Dett­ling de la fonda­tion Paul Schiller. 

En Suisse, cette insti­tu­tion phil­an­thro­pi­que œuvre en faveur d’une bonne prise en charge des person­nes âgées. Elle se mobi­lise en parti­cu­lier dans les domaines où l’État ne l’est pas (encore). «Nous nous voyons comme une force équi­li­brante. Nous avons des ressour­ces finan­ciè­res et, par rapport à l’État ou au secteur privé, nous sommes indé­pen­dants», déclare-t-elle. Ainsi, la fonda­tion est plus agile dans ses actions. Les fonda­ti­ons peuvent déce­ler des problè­mes, les défi­nir et trou­ver des solu­ti­ons de manière auto­nome. Cela est abso­lu­ment néces­saire sur la ques­tion de la vieil­lesse. Les réfor­mes poli­ti­ques sont bloquées. Avec l’évolution démo­gra­phi­que, il est urgent de trou­ver des répon­ses rapi­de­ment. Le scéna­rio de réfé­rence de l’Office fédé­ral de la statis­tique estime que d’ici 2045, un quart de la popu­la­tion aura plus de 65 ans – contre 18 pour cent en 2015. En 1998, l’espérance de vie d’une femme âgée de 65 ans était de 20,6 années supp­lé­men­tai­res contre 22,7 en 2018. Chez les hommes aussi, l’espérance de vie moyenne a augmenté après la retraite. Selon l’Office fédé­ral de la statis­tique, elle est passée à 19,9 ans, soit 3,4 ans de plus qu’à la fin du XXe siècle. De manière géné­rale, gagner une année de vie supp­lé­men­taire est une bonne chose. Cepen­dant, ce chan­ge­ment repré­sente un défi social majeur, car la nouvelle répar­ti­tion démo­gra­phi­que entre popu­la­tion active et person­nes retrai­tées nous conduit vers l’inconnu.  

Anto­nia Jann, direc­trice de la fonda­tion Age (Age Stif­tung), expli­que: «Nous nous trou­vons dans une situa­tion que nous ne connais­sons tout simple­ment pas. Nous deve­nons de plus en plus âgés et les person­nes âgées sont de plus en plus nombreu­ses. Dans le même temps, les person­nes restent auto­no­mes plus long­temps. Nous n’avons aucun modèle histo­ri­que pour ce cas de figure.» 

La façon dont notre société gère cela est marquée par des struc­tures passées qui n’existent plus. Anto­nia Jann voit toute­fois cet immense défi comme une chance. «Nous devons revoir notre façon de raison­ner et trou­ver des solu­ti­ons, car les solu­ti­ons actu­el­les ne sont pas sans poser de problè­mes au vu des nouvel­les condi­ti­ons démo­gra­phi­ques.» Comme le souhaite son fonda­teur anglais inconnu, la fonda­tion Age se cons­acre aux person­nes âgées et notam­ment à leur habi­tat. «Le loge­ment est quel­que chose de très important et, plus l’on vieil­lit, plus cela est important», affirme Anto­nia Jann. «La fonda­tion Age veut contri­buer à élar­gir les perspec­ti­ves. Nous sommes une fonda­tion qui n’agit pas elle-même. Nous sommes une sorte de carbu­rant pour les inno­va­tions», souli­gne Anto­nia Jann. La fonda­tion part du prin­cipe que les person­nes travail­lant sur le terrain ont de bonnes idées et remar­quent ce qu’il est possi­ble et néces­saire de faire. Elle encou­rage là où cela aide les person­nes à mettre en œuvre leur projet, mais là aussi où l’on peut tirer les leçons d’un projet pour les démul­ti­plier. «Nous n’encourageons pas la créa­tion d’une solu­tion stan­dard mais l’étendue et la diver­sité des idées possi­bles», ajoute-t-elle. Depuis sa créa­tion en l’an 2000, la fonda­tion a soutenu près de 300 projets. Chaque année, elle subven­ti­onne des projets à hauteur d’environ trois milli­ons de francs.

Les condi­ti­ons de loge­ment, une ques­tion centrale

Les condi­ti­ons de loge­ment ont une grande influence sur la qualité de vie, le bien-être et le conten­te­ment des person­nes. Avec l’âge, elle devi­en­nent encore plus importan­tes», déclare Tatjana Kistler, responsable médias de Pro Senectute.

Cette fonda­tion est le plus grand et le plus important orga­nisme de presta­ti­ons de service pour les person­nes âgées et leurs proches en Suisse. Elle a récem­ment publié l’étude Loge­ment et retraite réali­sée en colla­bo­ra­tion avec Raiff­ei­sen. Celle-ci montre que le loge­ment est un sujet qui préoc­cupe les person­nes à l’âge de la retraite. Près de deux tiers des 35–44 ans y ont déjà réflé­chi, mais seule­ment 10 pour cent se font conseil­ler. Le sondage a égale­ment révélé que la satis­fac­tion des loca­tai­res augmente avec l’âge. Chez les 35–44 ans, seuls 60 pour cent envi­ron sont satis­faits de leur domic­ile. Cette valeur passe à 90 pour cent chez les person­nes âgées de 65 à 75 ans. Pour­tant, avoir une situa­tion de loge­ment satis­faisante n’est pas une évidence. «Pour pouvoir vivre de manière auto­nome le plus long­temps possi­ble, il convi­ent de s’organiser suffi­sam­ment tôt avec ses proches et de se poser certai­nes ques­ti­ons», conseille Tatjana Kistler. Pro Senec­tute propose ici son soutien. «En effet, l’endroit où nous vivons actu­el­le­ment n’est pas toujours un loge­ment idéal pour une personne âgée.» En faisant des aménage­ments, il est possi­ble de répondre à certai­nes exigen­ces pour adap­ter un loge­ment à un senior. Il y a toute­fois des limi­tes. Dans certai­nes situa­tions, il est impé­ra­tif de démé­na­ger. Cela peut être un profond boule­ver­se­ment, car il faut quit­ter un endroit fami­lier. «Pour beau­coup, démé­na­ger lorsqu’on est âgé signi­fie aban­don­ner une partie de son auto­no­mie», affirme Tatjana Kistler.

Le loge­ment ne se limite pas à quatre murs

L’étude Loge­ment et retraite met en évidence l’importance des loge­ments permet­tant de vivre de manière auto­nome. Une grande partie des person­nes inter­ro­gées âgées de moins de 75 ans décla­rent qu’elles n’ont pas besoin d’aide et que, si elles en avai­ent besoin, elles obti­en­drai­ent le soutien de leurs proches. L’encouragement d’un mode de vie auto­nome prend clai­re­ment de l’importance, et à ce sujet, il n’y a pas que les préfé­ren­ces person­nel­les des person­nes direc­te­ment touchées qui entrent en compte. Notre société est vrai­ment obli­gée d’encourager les formes de loge­ment qui permet­tent de contin­uer à vivre de manière auto­nome. En effet, les enfants nés du baby-boum seront à la retraite dans les années à venir. Concrè­te­ment, cela signi­fie qu’un actif sur cinq en Suisse sortira du premier marché du travail. «La poli­tique dit qu’il faut privilé­gier la prise en charge ambu­la­toire à l’hospitalisation. Les gens doivent pouvoir rester le plus auto­no­mes possi­bles à la maison et c’est aussi ce qu’ils veulent», déclare Anto­nia Jann. Une personne âgée de 90 ans doit elle aussi pouvoir vivre chez elle. «Cepen­dant, si elle ne reçoit ni aide ni soutien, cela peut être diffi­cile», affirme-t-elle. Les infra­struc­tures et les modè­les de rembour­se­ment doivent donc être adap­tés en consé­quence. Et parce que le chan­ge­ment démo­gra­phi­que s’accompagne de chan­ge­ments sociaux, cela néces­site de bons exemp­les sur la ques­tion du loge­ment chez les seni­ors. Aujourd’hui, il existe déjà des offres permet­tant aux person­nes de contin­uer à vivre chez elles, notam­ment l’aide et les soins à domic­ile, les services de livrai­son de repas à domic­ile et l’aide ména­gère, comme le propose Pro Senec­tute. Cepen­dant, une réfle­xion plus appro­fon­die doit être menée sur ce sujet. «La ques­tion des seni­ors doit être prise en compte dès le départ, au moment où l’on déve­lo­ppe des surfaces», déclare Anto­nia Jann. «Et les commu­nes doivent elles aussi se pencher sur le sujet avec les acteurs privés.» Pour soute­nir les commu­nes dans ce sens, la fonda­tion Age a lancé la deuxième phase du programme Socius en cours d’année. Ce programme entend rassem­bler des connais­sances sur la manière dont les commu­nes et les régions peuvent gérer le chan­ge­ment démo­gra­phi­que le mieux possi­ble. Dix commu­nes y parti­ci­pent. Elles élabo­rent des systè­mes de soutien aux person­nes âgées. Selon Anto­nia Jann, les commu­nes et les régions jouent un rôle important concer­nant la réori­en­ta­tion en matière de prévoy­ance vieil­lesse. Elles doivent montrer qu’il n’y a pas de fail­les importan­tes en termes d’offres et veil­ler à ce que l’engagement de la société civile puisse être encou­ragé et maintenu

Extrait de The Philanthropist, numéro 2/2020

Il y a âgé et âgé

Dans le cadre de la discus­sion autour des nouvel­les formes d’habitat, un phénomène passi­on­nant se produit quant à la défi­ni­tion du mot «âgé». «L’habitat inter­gé­né­ra­ti­on­nel est une expres­sion magi­que», affirme Anto­nia Jann. «Personne n’a rien contre.» Pour les person­nes âgées, l’expression est posi­tive, car ils ont plai­sir à être avec des person­nes plus jeunes. À l’inverse, cela ne dérange pas ces derniè­res de côtoyer aussi des person­nes âgées. Les choses se corsent avec le terme «âgé». Aujourd’hui, ce mot regroupe une tran­che d’âge de pres­que 40 ans. Il peut faire réfé­rence à des actifs de 60 ans comme à des person­nes retrai­tées âgées de 100 ans. Il n’y a donc pas de vieil­lesse, mais une avan­cée en âge. Anto­nia Jann pense égale­ment que le seul mot «âgé» ne suffit pas. À titre de compa­rai­son, elle cite l’exemple de la neige. En Afri­que, un mot suffit peut-être pour parler de la neige, mais au Groen­land, il en faut une multi­tude. D’où le scep­ti­cisme généré par le mot «âgé». «Lors­que les person­nes disent “Je ne suis pas encore âgé”, cela signi­fie “Je ne suis pas encore sénile, je peux encore me débrouil­ler tout/e seul/e. Je peux gérer mon quoti­dien”», déclare Anto­nia Jann. «Cela ne signi­fie pas qu’elles pensent être encore jeunes. Elles expri­ment plutôt le fait qu’elles ont encore la volonté d’être autonomes.»

Prolon­ger les années en bonne santé

Pour que cela fonc­tionne, il faut que la santé soit bonne. Toute­fois, les années supp­lé­men­tai­res que l’on gagne avec l’augmentation de l’espérance de vie ne s’accompagnent pas auto­ma­ti­quement d’une santé opti­male. Une mala­die peut soudain mettre fin à une vie auto­nome. Pour mini­mi­ser ce danger et prolon­ger les années de vie en bonne santé, l’EPF Zurich mène des recher­ches sur la manière de vieil­lir en bonne santé. Les années de vie supp­lé­men­tai­res doivent être décou­plées des mala­dies chro­ni­ques le plus possi­ble. Un nouveau profess­o­rat a été créé en complé­ment des travaux de recher­che existants réali­sés par les nombreux profes­seurs de l’EPF Zurich sur de multi­ples aspects du sujet. Depuis le début de l’année 2020, James Mitchell est profes­seur de biolo­gie du vieil­lis­se­ment sain. Aupa­ra­vant, il était profes­seur extra­or­di­naire à la Harvard School of Public Health de Boston. Il se cons­acre à des aspects spéci­fi­ques du vieil­lis­se­ment biolo­gi­que, à des appro­ches scien­ti­fi­quement fondées de l’influence de ce proces­sus ainsi qu’aux mala­dies qui vont de pair avec le vieil­lis­se­ment. Entre la méde­cine et ses recher­ches, la fron­tière est floue: il étudie les méca­nis­mes molé­cu­lai­res qui retar­dent le déve­lo­p­pe­ment de mala­dies liées au vieil­lis­se­ment et nous main­ti­en­nent plus long­temps en bonne santé. 

«La recher­che sur notre santé et sur le vieil­lis­se­ment en bonne santé s’accélère grâce au soutien de mécè­nes et de parten­aires», affirme Donald Till­man, direc­teur de l’ETH Foundation.

Plus que des soins

La fonda­tion Paul Schil­ler œuvre elle aussi en faveur de la recher­che, mais dans un domaine qui corre­spond à ses critères de soutien. Actu­el­le­ment, son action se concentre davan­tage sur les facteurs socio­cul­tu­rels et psycho­so­ciaux. Leur importance se comprend si l’on observe le dérou­le­ment de la jour­née d’une personne âgée: «Aussi décisifs soient-ils, les soins médi­caux ne repré­sen­tent qu’une toute petite partie de la jour­née», constate Maja Nagel Dett­ling. En règle géné­rale, ce sont aussi ces presta­ti­ons qui sont assu­rées et finan­cées en premier lieu. Mais si l’on veut assurer une qualité de vie aux person­nes âgées, notam­ment à celles dont l’autonomie est limi­tée, la grande diffi­culté consiste à orga­niser le reste de leur jour­née. «Le travail défi­ni­ti­onnel est ici important et la science néces­saire. Il s’agit d’encourager les échan­ges avec l’ensemble de la société et les spécia­lis­tes», affirme-t-elle. Avec le coro­na­vi­rus, nous avons compris que les person­nes avai­ent besoin de soins, mais aussi d’un accom­pa­gne­ment psycho­lo­gi­que et social. Cela néces­site des compé­ten­ces adéqua­tes, par exemple des compé­ten­ces socio-pédago­gi­ques ou des compé­ten­ces comme en apportent les assistants en soins ou les spécia­lis­tes en acti­va­tion. La fonda­tion veut s’impliquer dans ce domaine. «Nous voulons lutter contre les souf­fran­ces les plus fréquen­tes qui accom­pagn­ent le vieil­lis­se­ment», déclare Maja Nagel Dett­ling, et elle inclut – en s’appuyant sur la philo­so­phie Eden – la soli­tude, l’inutilité et l’ennui. Elle voit un grand potentiel dans ce renforce­ment de la vision globale du vieil­lis­se­ment. Les fonda­ti­ons peuvent faire beau­coup dans ce domaine. La mise en rela­tion et la coor­di­na­tion renfor­cent le dialo­gue. Maja Nagel Dett­ling en est consci­ente. «Nous avons besoin de faits, nous devons savoir quel­les sont les diffi­cul­tés», affirme-t-elle. Elle s’implique donc égale­ment dans le groupe de travail de Swiss­Foun­da­ti­ons sur le vieil­lis­se­ment au sein duquel diffé­ren­tes fonda­ti­ons échan­gent et s’entendent sur les grands défis que présente ce sujet. Pour Maja Nagel Dett­ling, il est important «que nous considé­ri­ons l’homme et la vieil­lesse dans sa globa­lité.» Selon elle, il ne s’agit pas uniquement de la santé; les facteurs envi­ron­ne­men­taux, l’organisation du quoti­dien donnant un sens à la vie et les cont­acts sociaux sont tout aussi essentiels.

Contre la soli­tude, des choses simp­les telles qu’un sourire ou un échange insou­ci­ant avec des enfants peuvent aider. «Les premiè­res acti­vi­tés avec ce que l’on appelle les clowns d’accompagnement ont eu lieu dans des maisons de retraite dans les années 1990», affirme Beat Hänni. Cepen­dant, les moyens finan­ciers aurai­ent souvent manqué. La fonda­tion Humor & Gesund­heit créée en 2005 a depuis permis de finan­cer en partie près de 70 projets de ce type. Parmi eux figu­rent les visi­tes de clas­ses d’école enfan­tine dans ces centres pour person­nes attein­tes de démence – avec leur insou­ci­ance, les enfants réus­sis­sent à créer des liens empreints de gaîté entre les géné­ra­ti­ons. Outre son action en faveur des clowns d’accompagnement, la fonda­tion Humor & Gesund­heit s’implique dans les forma­ti­ons initia­les et conti­nues dédiées à l’humour dans les établis­se­ments médico-sociaux pour les employés de ces struc­tures. Cela faci­lite le cont­act avec les rési­dents et stimule leur propre humour en tant que ressource pour comb­attre les situa­tions diffi­ci­les. Car l’humour ne vieil­lit pas!

Crise du coronavirus

Cet échange est devenu plus diffi­cile avec la crise actu­elle. Dans le même temps, celle-ci révèle le pouvoir qu’ont ces aspects. En raison du coro­na­vi­rus, les person­nes âgées sont isolées et restent la majeure partie du temps chez elles ou dans une maison de retraite. Mais il y a aussi beau­coup d’engagement social, beau­coup de posi­tif. La valeur de l’assistance devi­ent plus visi­ble. De nombreu­ses initia­ti­ves sont lancées en faveur des person­nes âgées. Souvent, il s’agit de prime abord de rendre un simple service comme faire les cour­ses. Toute­fois, l’aspect social qui en découle est signi­fi­ca­tif. «Grâce à ces cont­acts, les person­nes ont encore accès à la société, malgré l’isolement», affirme Maja Nagel Dett­ling. Pendant la crise, de nombreu­ses fonda­ti­ons ont utilisé leurs compé­ten­ces et ont réagi rapi­de­ment sous de multi­ples formes: Pro Senec­tute par exemple a lancé, en parten­ariat avec Migros, un service de cour­ses avec livrai­son gratuite exclu­si­ve­ment assuré par des béné­vo­les pour les person­nes en quaran­taine. En peu de temps, près de 30 000 person­nes se sont inscri­tes pour aider. La crise a mis en lumière ce qui reste souvent en arrière-plan: l’importance et le potentiel des béné­vo­les. Un travail sous-estimé: «En fait, nous repré­sen­tons un secteur important: une personne sur trois fait du béné­vo­lat. Au total, les béné­vo­les effec­tu­ent près de 660 milli­ons d’heures de travail repré­sen­tant une valeur de 34 milli­ards de francs par an», déclare Thomas Hauser, direc­teur de Bene­vol, l’organisation faîtière du travail béné­vole en Suisse.

Il est diffi­cile d’aider, il est encore plus diffi­cile de rece­voir de l’aide

Le travail béné­vole fait partie inté­grante de notre société. Il est présent dans pres­que tous les aspects de la vie. Pour­tant, il a des diffi­cul­tés à atti­rer l’attention en tant que secteur: «Ce travail est souvent d’une grande importance dans les petits projets et d’une importance moindre dans les grands», affirme Thomas Hauser. Les petits projets locaux sont souvent portés par des travail­leurs silen­cieux. Cette proxi­mité avec les gens, cette inté­gra­tion dans des projets indi­vi­du­els locaux empê­chent que le travail réalisé au béné­fice de l’ensemble de la société soit pris en compte comme il se doit. «Le travail béné­vole ne fait l’objet d’aucune subven­tion de la part de Berne et n’est pas régle­menté», expli­que Thomas Hauser. Si le secteur souhaite de meil­leu­res condi­ti­ons-cadres sous la forme d’une mise à dispo­si­tion de lieux, il considère qu’une régle­men­ta­tion serait contre-produc­tive. En effet, on ne peut pas forcer quelqu’un à travail­ler béné­vo­le­ment. «Il faut être touché person­nel­le­ment. Les ressour­ces corre­spond­an­tes sont alors rapi­de­ment dispo­nibles», déclare-t-il. Le travail béné­vole vient de la société civile et l’ancienne géné­ra­tion joue ici un rôle important. La crise actu­elle montre son double rôle. Elle est à la fois donneuse et rece­ve­use de services. Le fait que de nombreu­ses person­nes âgées ne fassent pas de béné­vo­lat actu­el­le­ment en raison du coro­na­vi­rus est palpa­ble. La «jeune» géné­ra­tion est encou­ra­gée à se mobi­li­ser et se montre très impli­quée dans l’aide aux «grou­pes à risque». Le quoti­dien lié à cette crise montre que nous pouvons et devons apprendre à accep­ter cette alter­nance entre aider et être aidé. «Il est diffi­cile d’aider», souli­gne Thomas Hauser. «Il est parfois encore plus diffi­cile de rece­voir de l’aide.» Une personne qui a déjà fait l’expérience d’aider en tant que béné­vole recevra de l’aide plus faci­le­ment. Cela est crucial, en parti­cu­lier pour la géné­ra­tion vieil­lis­sante. Thomas Hauser parle aussi d’une troi­sième et d’une quatrième géné­ra­tion, une troi­sième active et une quatrième qui a besoin d’aide. «Avec cet échange, on peut plus faci­le­ment s’imaginer ce qui nous attend dans la dernière partie de notre vie et comment nous aimer­i­ons l’organiser», expli­que-t-il. Pour moti­ver la troi­sième géné­ra­tion à faire du béné­vo­lat, il faut avant tout des offres attra­yan­tes. «Le travail béné­vole moderne ne va pas sans parti­ci­pa­tion: le bien-fondé de l’action est reconnu lors­que l’individu a le senti­ment de faire la diffé­rence. Les béné­vo­les veulent appor­ter leur pierre à l’édifice, parti­ci­per aux décis­i­ons.» Ces derniè­res années, un chan­ge­ment fonda­men­tal s’est produit en la matière. Aujourd’hui, les béné­vo­les se mobi­li­sent davan­tage pour un projet spéci­fi­que que pour une longue durée – même si, de projet en projet, leur enga­ge­ment peut en fin de compte s’étaler sur plus­ieurs années. L’individualisation du travail béné­vole est aussi un peu para­doxale. Thomas Hauser reti­ent que «le sens que l’on donne aux choses n’est palpa­ble que collectivement.»

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

StiftungSchweiz encourage une philanthropie qui atteint plus avec moins de moyens, qui est visible et perceptible par tous, et qui apporte de la joie.

Suivez StiftungSchweiz sur